Raconter mon histoire
Raconter des histoires. Tous les enfants, petits et grands, aiment les histoires, les raconter et les écouter. Tous les créateurs et les artistes racontent des histoires à travers leurs créations. Il peut s’agir d’histoires vraies, ou vécues, ou imaginées, qui racontent ce qui nous motive, ce qui nous inspire, ce qui fait de nous ce que l’on est. Qu’elles fassent allusion à la culture, au rêve, à nos émotions, elles fomentent la vie. Fabriquer des histoires c’est ce qui fait avancer.
Moi aussi j’ai toujours aimé raconter ou écouter des histoires. En écrire aussi, et j’ai voulu cette fois en publier une. Celle des origines. Mon livre Casa Dolorosa sortira très bientôt.
Extrait:
Avec Papa, on a sorti de la remise les vieilles chaises longues en métal et dégotté de vieux matelas en kapok pas trop moisis, une quantité impressionnante de chaises de jardin encore en état et l’énorme planche en bois massif qui sert aux fameux pique-niques depuis leur institution. Les tréteaux, heureusement pas trop vieux, ont l’air de pouvoir la supporter. Dans la « chapelle à pastis », en face du bassin, et dans le prolongement de la remise, il règne un joyeux bordel et de la poussière accumulée depuis une vingtaine d’année. Un grand sac de gobelets et de vaisselle en plastique part directement à la déchetterie, en même temps que les vieux maillots à fleurs et bonnets de bain de Mamy. On a quand même gardé une vieille paire de tongs noirs, l’épuisette à poissons et une bouée de notre enfance pour la déco. Les carafes et les verres lavés ont retrouvé leur place sur les carreaux de faïence verte, sur le rebord des fenêtres grandes ouvertes ; au sol, les tomettes lessivées rougissent à la lumière du soleil. Le vieux frigo ne marche plus et le secrétaire du fond qui sert de bar et de vaisselier est de plus en plus déglingué, mais la lumière qui rentre fait renaître l’ambiance joyeuse des souvenirs.
Sur la grande terrasse en contrebas du bassin, des herbes sèches poussent çà et là entre les dalles de pierre, mais le mûrier rouge qui a pris racine tout seul là au milieu, est devenu magnifique et prodigue une ombre délicieuse sous ses grands bras étendus. En regardant vers le théâtre, au-delà des grandes marches qui servent aussi de gradins, les carrés d’herbe toute jaunie qui entourent le petit bassin font ressortir le vert luisant et le bleu profond des agapanthes qui bordent les allées. Les cyprès partent dans tous les sens et la scène est encore recouverte des feuilles mortes de l’hiver dernier, mais la sérénité qui émane de ce lieu est magique et rassurante. Le théâtre, encadré de lauriers roses et de petits cyprès malingres, se détache sur fond de verdure, auréolé par la frondaison sombre et touffue de l’énorme chêne centenaire. Comme s’il nous attendait là indéfiniment.